Naissance du poète Jean Follain

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En 1933 paraît aux éditions Corréa le premier recueil du poète Jean Follain, La Main chaude. Ce premier recueil sera repris intégralement dans Usage du temps en 1943 (Gallimard).

La Main chaude

La Main chaude de Jean Follain, 1943.

Cette publication donne lieu au premier numéro de L’Année poétique, avec une présentation d’André Salmon et un portrait de l’auteur par Janine Pichard.

Année poétique, premier numéro, décembre 1933

L’Année poétique, premier numéro, décembre 1933

Jean Follain est ainsi présenté :

A Canisy (Manche). A la tête d’un compas renversé dont les branches se plantent, l’une dans la mer, l’autre dans la terre dure de la lande de Lessay, pleine de fantômes qu’une fois l’an l’on oppose aux plus splendides ivrognes. En 1903, au regard des purs Normands du Cotentin, le peu qui demeurait des exaltations de Barbey d’Aurevilly, ce n’était guère que ce quasi-centenaire, ancien domestique du gentilhomme ayant fourni le modèle d’un héros des Diaboliques, qui se chauffait, sur un banc, au blanc soleil de Valognes, parfaitement méprisé de la population. Louis Beuve, poète rustique de belle allure, devait sa gloire foraine à la faveur du cidre. Fernand Fleuret n’avait pas fini de recopier ses Friperies, et Cherbourg ne voyait débarquer aucun poète américain en investigation. Jean Follain naissait. On déménage des manuels scolaires pour installer le berceau. Un père universitaire pour premier instituteur. Le lycée provincial. La faculté, à Caen. Mais des vacances! La lande de Lessay, la cathédrale de Coutances, les jardins qu’aimait Remy de Gourmont, le cidre, la foire, les fantômes, les chevaux, les rustres éloquents, les pensées raides et éclatantes tant que blouses neuves, voilà qui ordonne des vacances opposées à celles d’un Grand Meaulnes. Quoi? Rimbaud d’avance purifié par la bénédiction maternelle?

Jean Follain à Caen, Jean Follain étudiant de province. Logé à l’hôtel de Brummel, sans rien savoir de Brummel. Follain nocturne gobant les étoiles, au pied de la statue de Malherbe, parmi les restes du marché aux herbes. Et le coup de cidre, donc!

A Paris, pour ses compagnons, c’est «Feu-Follet-Follain ». Il donne des vers à Commerce (1928), Esprit, la Nouvelle Revue Française, le Journal des Poètes. Il publie, en 1933, son premier recueil, La Main chaude, qui, du coup, le porte au premier rang de sa génération.

André Salmon.

BIBLIOGRAPHIE: Cinq poèmes ornés de cinq dessins de Poncet (Darantière, 1932). La Main chaude, introduction d’André Salmon (Corréa, 1933).

Jean Follain

Jean Follain

 

Le premier numéro de L’Année poétique comprend quinze poèmes de Jean Follain. En voici deux.

Poème de Jean Follain

Poème extrait de La Main chaude.

Poème de Jean Follain

Poème extrait de La Main chaude de Jean Follain.

Le second numéro de L’Année poétique sera consacré à Max Jacob.

A lire absolument : Élodie Bouyghes, Genèse de Jean Follain, Garnier.

 

Élodie Bouyghes

Fille du chemin

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Fille du chemin

Fille du chemin, Le Silence qui roule éditeur

Présentation de l’éditeur

Ce livre singulier de Jean Pierre Vidal est composé de sept récits et se termine par un envoi en forme de poème; récits de rêves exacts où frissonne l’amour inaccompli mais où «n’être rien n’est pas vaine aventure ».

À chaque lecteur d’en faire son miel ou son chemin, chacun ayant sans nul doute déjà connu ces lieux de la rencontre sans hier et sans demain mais porteurs d’une émotion réelle dans ce présent silencieux qui ne rapproche ni ne sépare.

4ème de couverture:

Se repaître du monde, nous n’avons rien d’autre à faire, dans la veille et dans le sommeil, et puissions-nous le faire dans la bienheureuse proximité d’un autre mortel plutôt que dans l’isolement amer ou dans les diverses manducations appelées par les hommes amours, noces, sentiments humains.

J. P.V.

 

DU MÊME AUTEUR

Philippe Jaccottet, Payot, Lausanne

Feu d’épines, Le Temps qu’il fait

La fin de l’attente, Le Temps qu’il fait

Vie sans origine, Les Pas perdus

Passage des embellies, Arfuyen

Exercice de l’adieu, Le Silence qui roule

Le vent la couleur, Le Silence qui roule

 

LIVRES D’ARTISTE accompagnés d’estampes de Marie Alloy,

Editions Le Silence qui roule

Du corps à la ligne comme un chemin de morsures

Thanks

Gravier du songe

Le Jardin aux trois secrets

Aller sans retour

Commande à votre libraire ou à l’éditeur : https://www.lesilencequiroule.com/

 

Jean-Michel Frank

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Quand j’ai pensé à vous écrire cette lettre, je ne savais pas si vous étiez vivant ou mort. Et puis j’ai appris votre mort. Elle était prévisible, annoncée par la délicatesse de votre dernier livre, et surtout de son titre : Dernier dernier nuage. Vous aviez le génie des titres. Un autre ici m’éclaire : Dieu protège les roses ! Les deux livres sont dans un coffre-fort qu’il y a dans la banque des nuages. Je vous ai lu dix fois, ça ne s’éclairait pas, et puis tout d’un coup le soleil a explosé en silence sous mes yeux. J’ai tout compris. Est-ce que «comprendre » est le mot ? Je n’en suis pas sûr. Disons que tout d’un coup je suis rentré dans votre cœur.

Christian Bobin, Le Monde des religions, juillet 2013.

Jean-Michel Frank est né en 1922 et mort en 1988. Ses poèmes ont été publiés par Gallimard et Obsidiane, deux livres ont paru aux éditions Grasset.

« Jean-Michel Frank (1922-1988) aura donné neuf livres de son vivant, plus un posthume. C’est Jean Paulhan qui l’avait découvert, publiant son premier ouvrage dans la fameuse collection « Métamorphoses », en 1960. Le prix Max Jacob lui échoit en 1981, comme par mégarde car c’est un auteur ignoré de la critique, bien que ses poèmes, d’une extrême délicatesse et teintés d’humour subtil, soient tenus en grande estime par Yves Bonnefoy, Lorand Gaspar, Jean Grosjean ou encore Philippe Jaccottet. » (Présentation de l’anthologie parue chez Obsidiane)

Les éditions Obsidiane, fidèles à sa poésie, ont publié en 2018 une anthologie, avec une postface de Philippe Jaccottet.

Cette poésie est d’une extrême délicatesse, c’est sans doute la raison pour laquelle la critique l’a ignorée, dans notre époque de vacarme publicitaire.

Philippe Jaccottet a présenté plusieurs de ses poèmes dans son anthologie de poésie française contemporaine publiée par La Dogana.

Jean-Michel Frank

 

Françoise Matthey dans l’île

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Devant les vagues qui trouvent leur voie

non dans l’effort

mais dans l’absence d’effort

je comprends

l’illusion 

de mes luttes

Ce beau poème figure dans le recueil de Françoise Matthey Avec la connivences des embruns publié en 2016 par les excellentes éditions Empreintes (CP 6, CH-1022 Chavannes-près-Renens). Créées en 1984 par le regretté François Rossel (1955-2015) , ces éditions ont publié principalement des auteurs suisses de langue française ( Alexandre Voisard, Vahé Godel, François Debluë, José-Flore Tappy, Sylviane Dupuis, Pierre Chappuis), mais aussi des poètes français en fort dialogue avec la poésie romande (Judith Chavanne ou Pierre Voélin). Cette maison accorde le plus grand soin à la typographie et à la présentation des ouvrages publiés.

Doris Jakubec présente ainsi l’ouvrage :
« Une île, c’est un concentré de beauté terrestre dans l’immensité marine, sous l’amplitude du ciel ; toujours en train de parfaire sa beauté par le moins : les vents l’aiguisent, la mer avec ressac et marée la tient dans la rigueur de son mouvement perpétuel, le soleil met tout en lumière, failles et fissures comprises, les rochers millénaires se taillent sans cesse, selon une vaste dramaturgie cosmique. Son aura, elle, est légère, faite de sel, d’écume, d’embruns, de cris d’oiseaux.
La poésie, à l’image de l’île, est décantation, ascèse, chemin vers la nudité de l’être, en quête de l’essentiel du vivre et du mourir. D’où, dans les poèmes de Françoise Matthey, ces élans vers le bref, le peu, le moins : elle dit les perceptions au plus juste, au plus sobre, elle efface le je pour mieux interroger le monde, elle capte les ruptures et les harmonies, elle se plie au souffle et au rythme des vents, de l’eau. Ce faisant, elle découvre la mesure humaine, le temps suspendu, « l’irruption de la joie singulière ». »

Dans la promesse forte et ténue qu’est l’île, comme le poème, dans l’abandon aux éléments qui n’est pas perte mais dépouillement, c’est la nudité du présent qui est atteinte, c’est aux moments de la dictée des sens que l’approche de Françoise Matthey nous touche le plus fortement :

              Mes hanches tiendront parole

Si l’immensité égare, la contemplation des limites infiniment ouvertes de l’île ouvre à une sagesse qui est poésie et accord, car ce qui compte c’est bien, « ajustée au vivant », de

              Laisser naître l’aurore 

Le vent qui souffle est ici parfois porteur de l’amertume salubre de l’Ecclésiaste :

J’ai affronté les convulsions des cieux
cherché dans les coquillages échoués
la cendre syllabaire

Je n’ai vu que buée
au coeur vertigineux des songes

que vanité
dans mes jeux
mes désirs

Mais le poète femme sait recevoir et dire la vision de vie :

Vêtue d’enfants
une femme sur la grève

un bleu de houle tiède
où le monde a lieu


Françoise Matthey, originaire de France, est née à Strasbourg et vit, loin de la mer, dans le Jura bernois. Elle est l’auteur de plusieurs livres de poésie (Moins avec les mains qu’avec le ciel, 2003) et de récits (Le Transparent, 2013). Elle reçoit en 2001 le Prix Schiller, le plus ancien prix littéraire suisse, pour son poème à la mémoire d’une amie disparue, Comme Ophélie prenait dans l’eau sa force.

Editions de l’Aire

Editions Empreintes

Bibliothèque cantonale et universitaire de Lausanne